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Qu’ont en commun Stéphane, Jean- Paul, Valérie ou encore Xavier ? Tous les quatre ont décidé de se lancer en franchise après la cinquantaine. Plutôt que d’attendre, patiemment, la retraite ou enchaîner les refus sur un marché du travail qui n’aime guère les quinquas, ces séniors ont préféré entreprendre.
Économie circulaire, communication industrielle, restauration ou encore services à la personne, ces entrepreneurs ont déjoué les pronostics et les statistiques pour se lancer. Ils ont osé. Et ont choisi, pour leur fin de carrière professionnelle, une aventure entrepreneuriale bien spécifique : le monde de la franchise !
Pourquoi ce choix ?
Stéphane Muller, 55 ans, a lancé en avril sa propre franchise Cash Express, à Toulouse. Un projet en lien avec une volonté de retourner vivre en France après trente ans passés en Amérique du Sud. « Mon choix s’est assez logiquement porté sur Cash Express car, en plus d’être l’un des leaders de son secteur, c’est aussi une enseigne avec de belles valeurs et qui défend un concept dans l’ère du temps qu’est l’économie circulaire », détaille le quinquagénaire. Même son de cloche pour un autre cinquantenaire, Jean-Paul Rassemusse, multifranchisé dans le groupe O2, spécialisé dans les services à la personne. L’élément déclencheur du quinqua ? L’envie de mettre à profit des compétences managériales acquises tout au long de sa carrière professionnelle. « Grâce à mes choix dans le réseau O2, je me suis construit un patrimoine qui me permet d’envisager l’avenir sereinement et j’ai également renoué avec un management harmonieux et de belles relations humaines professionnelles », témoigne le chef d’entreprise. À la tête de quatre agences et avec un chiffre d’affaires de plus de 1,5 million d’euros, le franchisé se réjouit des très belles perspectives d’avenir dont il bénéficie grâce à la franchise.
Mais pourquoi s’ouvrir les portes de la franchise en fin de carrière professionnelle ? D’abord, sans doute, pour sortir d’une frustration rencontrée par les profils seniors en entreprise. Ainsi, un cadre senior sur trois considère que ses compétences et son expérience ne sont pas suffisamment reconnues et valorisées par son entreprise, détaille une étude de l’Apec publiée en octobre 2021. Management parfois mal perçu, manque de bienveillance de la part de certains collègues plus jeunes et au fonctionnement différent : les seniors n’ont pas toujours la vie facile dans le salariat classique.
Un âge idéal pour se lancer ?
Autre élément déclencheur d’un projet de création en franchise ? La difficulté, après 50 ans, à trouver un emploi. Fin janvier, 16 % des cadres demandeurs d’emploi avaient plus de 55 ans. « La franchise s’envisage souvent dans une deuxième voire une troisième partie de carrière professionnelle, analyse Jean-Luc Fumey, fondateur d’Avenir Franchise, cabinet d’accompagnement des franchiseurs. L’âge moyen des franchisés atteint aujourd’hui 46 ans, les profils seniors sont donc les bienvenus d’autant plus qu’ils ont souvent une forme d’indépendance dans leur mode de fonctionnement qui plaît aux franchiseurs. » Un constat partagé par Marina Charrier, directrice du développement franchise chez Oui Care : capables de prendre du recul, d’analyser des situations, de manager une large équipe et d’être à l’écoute de clients dont les besoins sont parfois vitaux, détaille-t-elle. Au sein du réseau, 15 % de nos franchisés, soit 31 entrepreneurs, se sont lancés après 50 ans. Parmi eux, 8 sont multifranchisés et certains ont même plus de deux agences. » Les aventures entrepreneuriales des seniors sont donc bien souvent synonymes de succès. Pour Jean-Luc Cohen, fondateur du cabinet Framboise Consulting, expert dans la franchise, cinquante ans est un bon âge pour lancer sa franchise. « À cet âge-là, on a bien souvent terminé de rembourser sa maison, les enfants sont indépendants, ont fini leurs études, bref le cadre de vie est plutôt idéal pour un pari entrepreneurial. » Les banques peuvent-elles être réticentes à financer les projets de création de franchise pour des profils plus seniors ? « Bien au contraire, poursuit l’expert de la franchise. À la cinquantaine, les franchisés ont souvent de belles économies sur lesquelles ils peuvent capitaliser, ils ont moins de charges et leur profil rassure les banques. »
Se lancer se prépare
Mais les seniors peuvent-ils se lancer dans tous types de franchises ? Dans le milieu, deux grands modèles coexistent pour les gérants de franchise. Ceux qui décident de s’investir sur le terrain et d’être dans l’hyperopérationnel. Et ceux qui développent davantage un rôle managérial et une vision de chef d’entreprise. C’est dans cette deuxième catégorie que l’on retrouve davantage les cinquantenaires qui se lancent. « Il faut bien sûr analyser le secteur, trouver une activité qui puisse correspondre aux contraintes physiques que l’on peut avoir et qui s’adapte également au rythme de vie que l’on souhaite mener », poursuit Jean-Luc Cohen. Illustration concrète avec Xavier Ory qui, après 25 ans dans le domaine de la chaussure avec un poste à forte responsabilité, a décidé de lancer une franchise Monceau Fleurs. Une expérience qui ne fait, à ses yeux, pas de lui un fleuriste. « Mon rôle n’est pas de faire des compositions florales mais de savoir gérer mon entreprise, analyse le néofranchisé. Le commerce, par définition, est une remise en question permanente, comme, entre autres, la maîtrise des coûts. Il faut savoir être réactif et attentif à la concurrence. »
Pour la coach professionnelle Émilie Depoux, fondatrice du cabinet Ouréa Coaching, la clé pour se lancer dans une telle aventure reste avant tout la réflexion. « Depuis la crise sanitaire, j’observe de plus en plus de personnes avec une longue expérience professionnelle qui décident de se lancer de manière indépendante, analyse la coach. Bien avant de le faire pour son activité, il faut réaliser son business plan personnel, voir combien de temps on peut tenir sans revenus fixes et ne pas hésiter à passer un bilan de compétences. » Une dernière statistique devrait donner le sourire aux quinquas qui hésitent mais sentent en eux l’envie d’entreprendre ; qui se base sur plusieurs années de données collectées, le National Bureau of Economic Research a analysé que les créateurs d’entreprises, âgés de plus de 50 ans, ont 1,8 fois plus de chance de réussir que leurs cadets de 30 ans. Chiche ?
Guilllaume Ouattara
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