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Comme souvent en période de crise, la franchise se démarque par sa résilience. Mais l’inflation actuelle n’est pas sans effets sur les réseaux. Heureusement, il existe des moyens de lutte pour appréhender au mieux cette hausse des prix: partage de la charge, renouvellement des concepts pour favoriser des solutions moins onéreuses ou encore diminution des coûts pour augmenter la marge.
Voilà plusieurs mois que l’inflation marque la France et que les entreprises, dont les franchises, en subissent la charge. « Pour l’instant, de façon générale, le moral est plutôt bon. Le vrai problème est de savoir ce qui se passera en fin d’année », explique Sylvain Bartolomeu, dirigeant associé de Franchise Management. De fait, les secteurs qui souffrent le plus aujourd’hui sont ceux qui ont connu le plus grand boom lors des confinements: il faut combler les retards, se débrouiller avec les pénuries, les marges qui se réduisent comme peau de chagrin – en raison notamment de devis établis sur des prix dépassés… Bref, la décroissance est toujours complexe à gérer.
« Premier conseil : ne pas paniquer, souligne Jean-Luc Cohen, fondateur du cabinet Framboise. Puis, le point essentiel est de se concentrer sur la marge, et non sur le volume, même s’il apparaît plus rassurant. » En période de prix instables, c’est vers la marge que l’on se tourne pour pouvoir tenir. La mutualisation des moyens, voilà l’une des forces d’un réseau, et cette création de synergies qui aident, notamment, à diminuer les coûts et à augmenter la rentabilité. Et plus un réseau est grand, plus son pouvoir de négociation sera élevé. « Par exemple, dans la restauration, la taille du réseau produit un impact significatif sur les négociations avec les plates-formes de livraison », souligne Sylvain Bartolomeu. Si l’on compare à des réseaux plus petits ou à des indépendants, les franchisés de grands réseaux sont donc déjà dans une position plus favorable pour résister et lutter contre l’inflation – tant que le franchiseur fait son métier.
Animer et innover
Autre levier essentiel: l’animation du réseau. Laquelle se doit de piloter le centre de profit, d’analyser les dépenses sur les postes de charge les plus importants, de voir l’impact de l’inflation, et de proposer des solutions adaptées aux franchisés. Des remèdes parfois étonnants, car pour un certain type de bâtiment, repeindre les toits en blanc économise sur les coûts de climatisation…
Dans certains secteurs, le franchiseur doit parfois faire évoluer son concept et ses formules. S’adapter. Dans la restauration notamment, il est possible de jouer sur les quantités et sur les recettes elles-mêmes, en utilisant des produits moins touchés par les pénuries et par l’inflation. Par exemple, si le poulet est moins affecté que le thon, il faudra pousser, via le marketing, les recettes au poulet… « En procédant de la sorte, on va réaiguiller les ventes et diminuer l’impact de l’inflation », souligne Laurent Delafontaine, fondateur d’Axe Réseaux. Pour certains réseaux, qui avaient fait de la quantité une qualité distinctive, c’est l’occasion de revenir à une certaine rationalisation – et donc une diminution des déchets dus à des portions excessives. « On peut également jouer sur le circuit court et la saisonnalité, qui sont non seulement à la mode mais avantageuses financièrement, grâce aux économies sur les transports », souligne Jean Louvel, associé chez Progressium.
Attention toutefois à bien penser l’impact de ces évolutions sur le consommateur. Lequel sait bien que l’inflation règne, il se résout à accepter certaines contraintes, comme une pénurie ou une hausse de coût – pas trop élevée. Malgré tout, même si le consommateur comprend, accepter des retards excessifs ou faire face à une absence de service client, par exemple, sera plus difficile à encaisser.
Partager la charge
Dans certains cas précis, le franchiseur supporte un peu plus le poids de l’inflation. Si le réseau est également la centrale d’achat (et de distribution) de ses franchisés – surtout dans le cas de contrats d’exclusivité, il joue sur les marges de ses fournisseurs et sur les siennes. Idem lorsqu’il s’agit d’une franchise industrielle (comme les fabricants de bières). Il est à même, sinon, de se montrer plus généreux que d’habitude sur les remises de fin d’année. Dans d’autres secteurs, comme le bâtiment ou les piscines, il devient plus qu’utile de poser des limites de durée aux devis proposés – et/ou alors de prendre en compte, d’une façon ou d’une autre, l’effet de l’inflation sur ledit devis. Et si ces précautions n’avaient pas déjà été prises, il est judicieux de revoir les contrats passés avec les clients, afin de plancher sur ce que l’on devra modifier.
Mais « d’une façon générale, une discussion doit avoir lieu au sein de chaque réseau sur là où le curseur doit être placé, pour savoir qui va supporter la charge de l’inflation, entre le franchiseur, le franchisé, et le consommateur », explique Laurent Delafontaine. Ultime détail: « Le franchiseur doit être fort, souligne Jean Louvel, sinon, c’est l’ensemble du réseau qui se retrouve menacé. » L’équation est fine, à chaque réseau de trouver son point d’équilibre.
Jean-Marie Benoist