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La vente sur Internet ne cesse de croître dans de nombreux secteurs d’activité et soulève l’épineuse question de la concurrence faite par le franchiseur aux membres de son propre réseau. Si le franchiseur peut librement exploiter un site internet marchand sans aucune restriction territoriale, quelle est alors la portée de la clause d’exclusivité ? A qui appartient réellement la clientèle locale ?
L’exclusivité accordée au franchisé n’est que relative
Bien que l’exclusivité territoriale ne soit pas une condition de validité du contrat de franchise, les clauses d’exclusivité sont très fréquentes. Elles permettent d’éviter les conflits entre les franchisés, et garantissent à chaque membre du réseau une zone de chalandise minimale.
Si ces clauses empêchent l’implantation d’un autre point de vente sur le territoire exclusif d’un franchisé, elles n’interdisent pas la vente par internet à des clients situés sur ce territoire. C’est du moins la position constante de la Cour de cassation, qui a jugé dès 2006 et qui réaffirme régulièrement depuis que l’exploitation d’un site internet marchand par le franchiseur ne porte aucune atteinte à la zone d’exclusivité concédée au franchisé. Cette interprétation est évidemment très critiquable : l’exclusivité est de fait remise en question par la vente directe en ligne, d’autant plus que les prix sont souvent plus avantageux sur internet. La concurrence est déloyale, entre un franchisé qui doit payer des redevances, un loyer, des salariés etc. et un franchiseur qui a pour seul frais la gestion du site internet.
La clientèle locale n’appartient plus intégralement au franchisé
La Cour de cassation a estimé à juste titre dès 2002 que la clientèle locale appartenait au franchisé. Cela est logique puisque le franchisé est un commerçant indépendant propriétaire de son fonds de commerce (à la différence d’un affilié). Or le champ libre laissé au franchiseur
pour exploiter sans limite un site internet marchand remet en question le droit de propriété du franchisé sur sa clientèle. Franchiseur et franchisé détiennent alors chacun un droit d’exploiter la clientèle locale, via des canaux différents. Il s’agit là d’une atteinte évidente au droit de propriété du franchisé.
La position très théorique de la Cour de cassation semble déconnectée de la réalité, qui évolue plus rapidement que la jurisprudence. La vente en ligne touche aujourd’hui quasiment tous les secteurs et de nombreuses enseignes tentent de fournir en ligne des services similaires à ceux proposés en magasin (conseils, accompagnement etc.). Les derniers avantages de la vente en magasins sont en train de disparaitre, et la survie des commerces de proximité est en cause ! Des solutions sont pourtant envisageables pour permettre aux différents modes de distribution de coexister : la redistribution des profits réalisés en ligne aux membres du réseau en fonction de la localisation des clients ou encore le renvoi des clients vers le site internet du franchisé, en fonction de l’adresse de livraison.
Il faut repenser l’avenir des réseaux de distribution et mettre en place des mécanismes redistributifs garants, à long terme, des intérêts de chacun.