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L’inflation revient, c’est le moment de ne plus surconsommer…
À en croire M. et Mme Michu, c’est oui : le chariot, même débarrassé de ses huit paquets géants de papier toilette et de ses 15 kg de pâtes, revient nettement plus cher au sortir de la supérette ou de l’hypermarché. Jusqu’à 50 euros. Nos voisins belges ont même pointé leurs facturettes : en moyenne, 20 % en plus sur le total d’avant.
Les distributeurs dont on vante tant l’abnégation – surtout leurs salarié/es, non ? – surferaient-ils sur la pénurie pour ré-étiqueter les rayons la nuit venue ? Pourtant, Michel-Édouard Leclerc se répand sur les plateaux pour marteler : des ruptures, mais pas de pénurie.
On se croirait pourtant bien en économie de pénurie avec son cortège d’augmentations. Demande plus forte que l’offre ? Ne parlons pas même des petites culbutes sur le gel hydroalcoolique et les masques, introuvables, Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, a fait les gros yeux. Pour le reste, les producteurs ajustent d’autant plus leurs marges que les centrales d’achat ne sont pas forcément en aussi bonne position de force pour imposer leurs prix. Les pénuries alimentaires annoncées si les récoltes souffrent de manque de main-d’œuvre pourraient, dans les mois à venir, amener le prix de l’asperge à celui de la fraise, elle-même au prix de… Oui, mais le carburant a baissé. Ah ouiche, et qui roule en ce moment ? Les réservoirs d’auto ne sont pas des cuves ! De là à penser que les économies de déplacement valent bien quelques euros en plus pour les courses…
Pour l’économiste américain Kenneth Rogoff, la relocalisation encouragée par la peur de manquer quand on dépend de fournisseurs à l’autre bout du monde va mécaniquement faire flamber les prix : « Fabriquer plus près, c’est fabriquer plus cher ». Mais l’épidémie n’est au mieux qu’un accélérateur de relocalisation, la tendance était déjà nettement en place.
Autre chose va diablement augmenter après-crise, la santé et ses équipements. Nos gouvernements n’oublieront plus les stocks de masques, de gels, de réactifs, de respirateurs, ne réduiront plus les lits et les personnels… Une belle inflation qu’il faudra d’autant plus payer que l’économie sera exsangue.
Tiens ! Rien que pour ces belles culbutes, on lira bientôt les blogs de complotistes déchaînés qui verraient bien dans l’affaire coronavirus la main des lobbys alimentaires et industriels (ils n’avaient pas besoin de ce coup de fièvre, l’interdiction des ventes à prix coûtant depuis février 2019 avait déjà amorcé la valse des étiquettes…).
Reste une autre tendance : le refus du gâchis, le do it yourself, les ateliers de réparation électroménagers, le souci des millenials de ne plus ajouter au chaos écologique, le recalibrage des hypermarchés. Nous sortirons de la crise sanitaire peut-être armé/es pour affronter d’autres crises inflationnistes…
Olivier Magnan
rédacteur en chef