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La franchise, ça s’apprend !
1. Se former au sein des réseaux
2. La formation dans les établissements supérieurs
3. Devenir chef d’entreprise
Diriger une entreprise, la gérer et la mener au succès relève-t-il d’un apprentissage ? Ou est-ce inné ? Un peu des deux ? Disons que l’on ne part pas toutes et tous sur un pied d’égalité. Dans le monde de la franchise, les candidats aspirent à devenir chefs d’entreprise. Car oui, les franchisés sont avant tout des dirigeants. Simplement, ils se montrent plus encadrés et accompagnés que l’entrepreneuriat classique. Bref, chef•fe d’entreprise, ça s’apprend, vraiment ?
« Je crois qu’il faut en finir avec le mythe de l’entrepreneur super-héros […] Un chef d’entreprise n’est pas ce héros que l’on imagine, il se montre bien plus proche de la réalité et entreprend rarement seul, le self-made man n’existe pas ! » lance Olivier Toutain, professeur d’entrepreneuriat à Burgundy School of Business. Un constat partagé par Matthieu Douchy, fondateur de CréActifs : « L’entrepreneur n’a évidemment pas de superpouvoirs, c’est monsieur Tout-le-monde qui, un jour, a osé se lancer. » Rompre avec ce mythe rend possible toute possibilité d’apprentissage. Évidemment, l’on ne réussit pas seul, on a besoin de partenaires, de clients, de fournisseurs, etc. L’entrepreneur se doit de cultiver ses relations, voilà quelque chose qui s’apprend à l’ère des réseaux sociaux et des soirées networking. Sans compter qu’en franchise, plus que tout autre modèle, on n’entreprend pas seul, l’on bénéficie déjà de la réputation d’un réseau et de son savoir-faire.
Démarrer sur les bons rails
Dans les écoles de management, on apprend à manager. Mais un manager n’est pas un entrepreneur. Diriger une entreprise, c’est aussi accumuler des compétences multiples qui guideront une entreprise vers le succès. Comme les ressources humaines, la comptabilité, le droit, le marketing, la communication, etc. Des savoirs objectifs, qui s’apprennent – soit sur les bancs de l’école, soit plus tard (en formation continue), soit avec l’expérience, sur le terrain. « Entrepreneur est un métier, plus les individus vont maîtriser leurs compétences métiers, plus ils auront tendance à créer une entreprise, défend Olivier Toutain, le dirigeant doit avoir une vision globale de toutes les dimensions citées et savoir prendre de la hauteur », poursuit le professeur.
Puisque la franchise est une forme, parmi d’autres, d’entrepreneuriat, « ceux qui se lancent doivent avant tout se demander s’ils veulent entreprendre, et accepter le risque de l’incertitude (certes moins élevé en franchise), des périodes difficiles, de l’instabilité », détaille Marc-William Attié, accompagnateur d’entrepreneurs. Puis, devenir chef d’entreprise en franchise se prépare : « choisir un secteur d’activité qui nous plaît et trouver l’enseigne avec laquelle on partage une culture commune, pour ce faire appelez les franchisés avant la tête de réseau, l’on ressent mieux le dynamisme et l’environnement ment d’un réseau lorsque le patron (le franchiseur) n’est pas là », sourit Marc-William Attié.
Des qualités indispensables
Quels ingrédients retrouve-ton chez les chefs d’entreprise qui réussissent ? « L’on a essayé dans les années 1990, aux États-Unis, de dresser le profil de l’entrepreneur… eh bien on s’est cassé les dents ! », affirme Olivier Toutain, tout simplement parce qu’il « n’existe pas de portrait type ». Cependant, on retrouve des qualités essentielles à la réussite d’un entrepreneur, parmi elles : la force de la différence – concept forgé par le sociologue et professeur des universités Norbert Alter. « Regarder le monde différemment », reprend Olivier Toutain, cela s’apprend. Les chefs d’entreprise doivent l’avoir en tête lorsqu’ils recrutent, une équipe composée de gens semblables freine la créativité. On regarde les choses autrement quand on est différents. Cela vaut bien entendu pour les réseaux de franchise, le franchiseur a tout intérêt à faire confiance à des franchisés qui ont des profils complémentaires, idem pour les franchisés dès lors qu’ils recruteront leurs collaborateurs. Autre qualité indispensable, plus complexe à apprendre car elle s’acquiert avec l’expérience, la résilience. Ou cette capacité à rebondir après un ou moult échecs. « On ne peut parler de résilience que s’il y a eu un traumatisme suivi de la reprise d’un type de développement, une déchirure raccommodée. Il ne s’agit pas du développement normal puisque le traumatisme inscrit dans la mémoire fait désormais partie de l’histoire du sujet comme un fantôme qui l’accompagne », écrit le spécialiste en la matière, Boris Cyrulnik, dans son ouvrage Le murmure des fantômes.
L’influence de la socialisation
Sans surprise, notre environnement (contexte familial et sphère éducative) influence notre vie professionnelle et notre volonté à devenir, oui ou non, chef d’entreprise. « Nous n’avons pas toutes et tous le même rapport au risque […] Si vous avez des parents euxmêmes entrepreneurs, vous aurez plus de chance de soit vous aussi entreprendre, soit rejeter le modèle », mais vous ne serez pas indifférents, estime Olivier Toutain. On ne fait pas abstraction de son passé.
Last but not least, subsistent encore aujourd’hui des divergences en termes de genre quant à l’entrepreneuriat. Les choses évoluent, et c’est tant mieux, mais les femmes – touchées de plein fouet par les stéréotypes de genre – ont plus tendance à hésiter avant de se lancer, à être plus (voire trop) prudentes. En franchise aussi, même si les chiffres, peu à peu, s’équilibrent. Depuis plusieurs années le nombre de femmes parmi les chefs d’entreprises franchisés tourne autour de 40 %. C’était 29 % en 1987 et 33 % en 2000. « Les charges familiales et sociales pèsent encore aujourd’hui sur la vie professionnelle des femmes », rappelle Olivier Toutain. Des inégalités de traitement demeurent, on ne pose parfois pas les mêmes questions à un candidat à la franchise qu’à une candidate. Davantage d’interrogations qui portent sur le projet en lui-même pour le premier, des questions plus concentrées sur la personne pour la seconde. Les clichés ont la vie dure. Mais avec un peu de sensibilisation, de bases théoriques, de pratique et d’échecs, devenir chef d’entreprise n’a rien d’insurmontable. À vous de jouer.
Geoffrey Wetzel
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