Les arrêts clés de la franchise – La jurisprudence contient nombre d’informations indispensables à un·e franchisé·e

La cour de cassation : ses magistrats ont tranché sur des points clés du contrat de franchise.

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La franchise est l’une des formes d’entreprenariat la plus dynamique en France. Et pourtant, il n’existe pas, en tant que tel, un droit spécifique à ce type de commerce associé. En revanche, plusieurs textes de loi et décisions de justice ont malgré tout créé un cadre juridique. À connaître absolument.

S’il est un arrêt essentiel à connaître dans la franchise, c’est Pronuptia du 28 janvier 1986 de la Cour de Justice de la Communauté européenne (CJCE, n° C-161/84). C’est lui qui valide les bases de ce qu’est la franchise aujourd’hui, centrée autour d’un savoir-faire, et qui, surtout, en valide les pratiques (dans certaines limites). En l’occurrence, la filiale allemande de Pronuptia Paris réclamait à sa franchisée, Mme Schillgalis, des redevances sur des CA passés. Devant la Cour européenne, la défenderesse plaidait la nullité du contrat. « L’arrêt Pronuptia pose la définition – encore actuelle – du savoir-faire et définit les apports pro-concurrentiels de la franchise, en les encadrant, explique Maître Jean-Baptiste Gouache, à la tête du cabinet éponyme.

La décision est fondatrice dans cette définition de la franchise. » Il en résulte que la franchise est une relation verticale de distribution entre des entreprises distinctes, qu’elle repose sur un certain nombre de restrictions concurrentielles entre le franchiseur et ses franchisé·es, en matière d’approvisionnement par exemple, ou de non-concurrence pendant et après la fin du contrat de franchise. Des pratiques qui, pour d’autres contrats de distribution, sont justement jugées anticoncurrentielles. Mais « l’arrêt Pronuptia valide ces restrictions dans le cadre d’un contrat de franchise dès lors qu’elles sont justifiées par la protection indispensable du savoir-faire transmis au franchisé ou encore par la nécessaire homogénéité du réseau », souligne Maître Grégoire Toulouse, associé chez TaylorWessing. Cet arrêt conduira, deux ans après, au premier règlement d’exemption européen dont il reprendra les définitions. Le concept de franchise en sort validé. Comme l’a titré la presse spécialisée de l’époque, « Les franchiseurs respirent ! »

Le savoir-faire, justement. Un arrêt essentiel de la Cour d’appel de Paris du 16 mai 2013 (n° 12-16960) vient préciser qu’il s’apprécie dans sa globalité. Il constitue un ensemble de techniques, informations et services, qui n’ont pas à être originaux, mais doivent fournir un avantage concurrentiel en économisant au franchisé des recherches longues et coûteuses.

L’obligation d’assistance est à son tour un élément clé de la franchise. Un arrêt important de la Cour d’appel de Paris du 20 décembre 2017 (n° 13/23287) vient rappeler, souligne Maître Gouache, que cette « obligation d’assistance du franchiseur à l’égard de ses franchisé·es est de nature exclusivement technique et commerciale et constitue une obligation de moyens ». Autrement dit, une tête de réseau n’a aucune obligation d’apporter une aide financière à ses franchisé·es.

Sur le DIP

Instauré par la loi Doubin à la fin des années 1980 pour limiter les fraudes et escroqueries, le Document d’information précontractuel revient sans cesse devant les juges, source intarissable de contentieux. Plusieurs arrêts sont venus éclairer plus exactement les modalités de sa constitution et les conséquences du non-respect de la loi.

Tout d’abord, dans un arrêt du 10 février 1998 (95-21.906), la chambre commerciale de la Cour de cassation a décidé que le·la franchisé·e devait démontrer que son consentement avait été vicié pour que l’annulation du contrat soit prononcée. « Il ne suffit pas de pointer une insuffisance du DIP pour obtenir l’annulation du contrat, souligne Maître Toulouse, encore faut-il que le franchisé démontre qu’il ou elle n’aurait pas contracté, ou en tout cas pas aux conditions proposée, s’il·elle avait reçu l’information manquante. »

Dans un arrêt du 11 février 2003 (01-03.932), la Cour de cassation a réaffirmé les termes de la loi sur la présentation de l’état du marché nécessairement incluse dans le DIP : « Le franchiseur n’a pas à fournir une étude de marché mais bien un état, en précisant ce qu’il est, à savoir un simple recueil de données brutes et objectives », explique Maître Gouache.

Sur le numérique

L’arrivée en force de l’e-commerce a soulevé bon nombre de questions dans la sphère de la franchise. Notamment en matière de concurrence entre un site Web et les franchisé·es. « L’arrêt du 14 mars 2006 de la chambre commerciale de la Cour de cassation – 03-14.316 – a précisé que l’exploitation d’un site Web marchand par le franchiseur ne violait pas l’exclusivité d’implantation territoriale consentie au franchisé et que, par conséquent, le franchiseur était fondé à prendre des commandes passées depuis le territoire du franchisé sans commettre de faute », décrit Maître Toulouse. Un franchisé ne peut donc s’y opposer. Mais libre à lui, aussi, de vendre sur le Web, à condition de respecter les clauses ad hoc du contrat, si elles existent et sont valides. Par exemple, un franchiseur peut interdire à ses franchisés de vendre sur Amazon ou d’autres plates-formes s’ils disposent d’autres options pour « e-commercer », typiquement un site propriétaire (décision Coty de la Cour de Justice de l’Union européenne – CJUE du 6 décembre 2017). Mais il n’est pas en mesure de limiter la vente en ligne en exigeant, par exemple, que la vente de ses produits exige une interaction physique (décision Pierre Fabre de la CJUE du 13 octobre 2011).

Jean-Marie Benoist

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