Boutique Monceau Fleurs, une organisation huilée

Une enseigne qui attaque le marché la fleur au fusil…
Une enseigne qui attaque le marché la fleur au fusil…

Temps de lecture estimé : 4 minutes

Fleur de l’âge  

De novembre à juin, au rythme des fêtes, la haute saison bat son plein chez les fleuristes. Visite chez un jeune franchisé Monceau Fleurs, qui a de la suite dans les idées.

Paris 15e, angle de la rue de la Convention et des pavés du passage Dombasle. Un  salon Franck Provost à droite, une boutique Chocolats de Neuville, à gauche. Voici l’une des plus récentes franchises Monceau Fleurs. 250m2 d’une boutique joliment rénovée, avec sa serre à orchidées et son grand comptoir. Pour les découvrir il faut déjà passer les parterres colorés de primevères et de jacinthes, ainsi que l’allée des roses d’Équateur qui chassent déjà les chrysanthèmes, stars un peu old school des premiers frimas de novembre. C’est Damien Camier qui reçoit. Quelques marches d’un escalier exigu mènent à un bureau sans charme qui tranche avec l’éclat du rez-de-chaussée. « Ici, nous n’avons pas pris le temps ni choisi d’investir pour le moment ». L’essentiel est ailleurs.

Opportunité saisie

Dans le parcours singulier d’abord de ce trentenaire associé à son frère Olivier. Respectivement orthopédiste et pédicure, ils ne sont en effet ni l’un ni l’autre issus du métier. « Après quelques années à notre compte, nous avons repris une structure développant des appareillages de la main », explique ce père de deux enfants qui travaille avec sa femme Cécile. Celle-ci a d’ailleurs quitté son métier dans l’audio-visuel. « Notre motivation ? Envie de connaître d’autres choses, d’avoir un autre métier. Nous sommes allés au Salon de la Franchise. Nous ne connaissions rien à ce secteur, mais il y a eu une rencontre. Au-delà de l’activité, c’est la relation que nous cherchions et l’efficacité en face de la redevance que l’on paie. » Du coup, en trois ans, les deux frangins ont repris quatre magasins. Deux d’un coup pour commencer, à Meudon et à Issy-les-Moulineaux fin 2013, profitant de la cession par le même propriétaire d’un Monceau et d’un Rapid’Flore, deux des enseignes du groupe Emova. Un choix qui peut sembler osé. « Cela a été une question d’opportunité et j’avais un peu peur, à tort ou à raison, de partir sur une création. C’était l’année de la transition du groupe, mais après quelques flottements, nous avons senti les choses se mettre vite en marche et nous avions comme avantage d’avoir des équipes en place dans les magasins. » Ils ouvriront une troisième boutique à Nanterre, avant les travaux initiés cet été rue de la Convention. Un challenge. « Tout est différent : le volume de marchandises, la clientèle, le chiffres d’affaires, le personnel à gérer… ».

Une enseigne qui attaque le marché la fleur au fusil…
Une enseigne qui attaque le marché la fleur au fusil…

« Nous travaillons du vivant »

Dix personnes, salariés et apprentis, se relaient ici 7 jours/7, de 9h à 20h30 du lundi au samedi et jusqu’à 19h le dimanche, avec quatre personnes en permanence, dont une affectée à l’extérieur. Le magasin, sous enseigne indépendante durant quatre décennies, a réalisé jusqu’à 1,5 M€ HT de CA avant de décliner ces trois dernières années suite à un repositionnement haut de gamme. L’objectif est de réaliser 1,2M€ à l’issue du premier exercice. À Cécile la coordination de l’opérationnel et la comptabilité en lien avec Monia, 16 ans de boutique et capitaine du navire parisien. A Damien la gestion et le développement. « Je ne suis pas du métier, je laisse cela à celles qui ont les compétences techniques. J’apporte mon esprit, j’analyse, j’écoute les propositions et je conserve le regard critique du client. Chacun à sa place. C’est un métier compliqué dans la mesure où nous travaillons avec du vivant périssable, souligne le jeune patron. Pour cela, nous nous appuyons sur des outils informatiques prospectifs et sur l’expérience des salariés, notamment Monia qui a la responsabilité des commandes. Tout est différent des trois autres magasins, qui font trois fois moins de chiffre d’affaires. Ici, il y a en moyenne trois arrivages hebdomadaires, jusqu’à quatre en période de rush, avec une fréquentation de 950 à 1 100 clients par semaine. Il faut donc calculer au plus juste avec la nécessité d’avoir quand même beaucoup de marchandise pour donner envie au client. » Des milliers de plantes et de fleurs fournies à 80% par la centrale du groupe, essentiellement venues des Pays-Bas, d’Amérique du Sud et du Sud de la France qu’il faut mettre en valeur. « Cela nécessite un sens artistique, de l’organisation et le goût de la relation avec le client », souligne le souriant Damien, qui passe deux à trois fois par semaine dans chacun de ses points de vente pour « prendre le pouls », même si le lancement de cette nouvelle boutique accapare pour l’heure la majorité de son temps. « Le personnel n’est pas si facile à trouver. Il existe donc un véritable enjeu de formation dans notre secteur, et garder le bon personnel est une priorité. »

« On nous fait confiance »

Derrière les chrysanthèmes d’Angers et de Belgique, Evelyne s’affaire. Elle est entrée dans le métier à 20 ans et a débuté au 225 il y a… 38 ans. Elle passe la majorité de ses 35 heures au pochage des fleurs dans l’arrière boutique, visiblement fière de son métier « Je suis heureuse de ce que je fais. Je n’ai pas changé de poste, mais le décor, lui, a changé… et en bien. Nous travaillons dans un bel endroit, qui plaît aux gens. Nous faisons très attention à la qualité des fleurs et des plantes. Vous avez vu la serre à orchidées ? Cela amène du chic. Regardez ce choix de bouquets ronds, c’est nouveau et cela me plaît », sourit-elle spontanément en réajustant le linéaire des roses du Kenya. « Les patrons ont confiance en nous, l’équipe est ensemble depuis longtemps et elle est complètement remotivée par cette reprise. On nous laisse enfin nous exprimer. » Un compliment désintéressé aux nouveaux patrons. « Dans un an et demi, je prendrai ma retraite. Mais ils savent tous qu’ils pourront m’appeler s’ils ont besoin. » Emmanuelle, 28 ans, avise les rolls, les charriots pleins de fleurs, qui viennent d’arriver. « Dans quelques jours, ce sera la place des Hellébore, les roses de Noël, et des Amaryllis, avant que les sapins de Noël n’arrivent en masse. Nous devrions en vendre

1 600 ! La vraie nouveauté pour nous depuis la reprise sous enseigne, ce sont ces meubles de présentation pensés pour ceux qui s’en servent. Le travail est devenu moins épuisant même s’il reste physique. Et puis la charte de présentation simple met en valeur les couleurs. Cela entretient notre passion. C’est un beau métier », glisse celle qui travaille ici depuis huit ans. Le changement d’enseigne a repositionné le magasin, avec des produits d’appel meilleur marché. « Mais cela ne doit pas effacer la créativité d’un personnel diplômé, d’un CAP voire d’un BP, et il ne faut pas que cela soit frustrant pour elles, ajoute Damien. C’est un enjeu dans le management : leur laisser leur expertise métier. Il est exigeant. Il faut donc savoir être compréhensif sur les petits problèmes de la vie, être arrangeant quand on peut l’être. Avec quatre magasins, on ne peut pas être partout, il faut donc savoir déléguer et valoriser les gens. Pour moi, construire les équipes, c’est le plus gros enjeu de l’entrepreneuriat. » Rue de la Convention, on sait déjà ce qu’il y aura sous les sapins venus d’Ecosse, du Danemark et du Morvan : de la confiance mutuelle.

Olivier Remy

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